Patrimoine géologique

Notre région a un patrimoine géologique très riche, gardant encore la mémoire de nombreux événements marquant de l’ère primaire (formation de sillons houillers…) à l’ère quaternaire (dépôts des travertins des sources salées…) en passant par l’ère tertiaire (volcanisme du Cantal…)

Qu’est-ce que le patrimoine géologique ?

La géologie (science de la terre) est composée de plusieurs disciplines nous permettant de mieux comprendre les phénomènes et processus qui constituent notre planète :

  • Géochronologie : ensemble des méthodes permettant d’assigner un âge aux roches ou aux minéraux
  • Géomorphologie : étude de l’évolution des reliefs et de ses causes
  • Hydrogéologie : partie de la géologie qui s’occupe de la circulation dans le sous-sol
  • Minéralogie : étude des minéraux
  • Paléontologie : étude des fossiles
  • Sédimentologie : étude de la façon dont se déposent les sédiments et dont se sont constituées les roches sédimentaires
  • Stratigraphie : étude de la succession des sédiments permettant une reconstitution des paysages du passé
  • Tectonique : étude des déformations de la partie superficielle de la Terre
  • Volcanologie : étude des volcans, des phénomènes liés à leur genèse et des roches qui en proviennent.

Souvent, des objets géologiques (restes ou témoins de l’histoire géologiques locales) visibles permettent d’illustrer tels événements ou phénomènes géologiques, au travers de ses disciplines particulières. Parfois, leur degré de rareté permet de reconnaitre le site qui les abrite comme patrimonial car il a en mémoire des objets à garder de génération en génération. On parle alors de patrimoine géologique. Les sites concernés sont souvent appelés « géosites ». En plus de ces disciplines, d’autres éléments sont pris en compte pour l’évaluation du patrimoine géologique d’un site :

  • Ressource naturelle : si le site comporte un ou des éléments extractibles pour les êtres humains (roches massives, combustible, minerai…)
  • Hydrothermalisme : se rapporte à la circulation souterraine d’une eau chaude, chargée en minéraux dissous.
  • Résultat du métamorphisme : transformation d’une roche à l’état solide du fait d’une élévation de température et ou de pression
  • Plutonisme : relatifs aux roches plutoniques, c’est-à-dire qui se sont formées par la cristallisation lente d’un magma à une certaine profondeur.

L'inventaire du patrimoine géologique

Chaîne des puys
Site de Gandaillat

Initié en 2006 par le Bureau de recherches géologiques et minières et le CEN Auvergne, finalisé avec l’appui de la Commission régionale du patrimoine géologique (CRPG) et validé au niveau national en 2017 par le Muséum d’histoire naturelle, l’inventaire régional « Auvergne » s’est appuyé sur une méthode nationale et a concerné 119 sites géologiques majeurs, un échantillon montrant la diversité géologique de notre région. Elle permet notamment de prendre en compte les différents thèmes géologiques. Ce qu’il ressort pour l’Auvergne :

  • Sans surprise et compte tenu de son histoire fortement marquée par le volcanisme, près de 50% des sites inventoriés répondent principalement de ce thème (Puy de Dôme, Puy Mary,…).
  • Ce sont ensuite des sites importants pour la géomorphologie et la paléontologie qui sont bien représentés, respectivement au regard des phases d’érosion et de modelage du quaternaire, et des restes des paléoécosystèmes des bassins du Puy-Chilhac et de Limagne notamment.
  • Viennent après les sites à l’intérêt « sédimentologie » (9%), dont fait partie l’ancienne carrière de Gandaillat.
  • Ensuite, ce sont 10 % des sites qui sont marqués par le plutonisme (granite…) et l’hydrogéologie (source salée).
  • Les autres sites se partagent de forts intérêts en termes de géochronologie, hydrothermalisme, métamorphisme, minéralogie et tectonique.

Depuis 2018, l’inventaire régional est devenu « Auvergne-Rhône-Alpes » et la CRPG étudie régulièrement de nouveaux sites à présenter à la validation nationale. L’inventaire du patrimoine géologique d’Auvergne-Rhône-Alpes compte 502 sites au 30 juin 2024.

Le patrimoine géologique sur nos sites naturels

Une vingtaine de sites que nous gérons sont contenus, contiennent ou intersectent un site d’intérêt régional pour le patrimoine géologique :

  • les sources salées : ces milieux, très rares en France, sont présents localement grâce à la présence de failles, formées il y a plusieurs centaines de millions d’années, qui permettent à des eaux saumâtres de remonter et s’épancher à la surface.
  • les gîtes à chiroptères : soit liés au volcanisme (grottes sous coulées : Grotte de la Denise, Mas d’Argnat), soit constitués d’anciennes mines.
  • les sites liés au volcanisme : d’anciennes cheminées de volcan érodées, des coulées de lave inversées et érodées, des cratères de volcan.
  • Des sites d’origine anthropique, comme le site de Gandaillat (ancienne carrière) qui illustrent une partie de l’histoire géologique locale grâce à de nombreux objets géologiques visibles

Une soixantaine de sites possède un patrimoine géologique identifié à dire d’expert ou avec des objets géologiques ordinaires. Enfin, une centaine de sites de notre réseau sont à « vocation » purement biologique.

pré salé
Source salée de Sainte-Marguerite
Grand rhinolophe (B. Rubod)

La prise en compte du patrimoine géologique dans la gestion de nos sites

Sur les sites de notre réseau, la prise en compte de la géologie se fait en plusieurs étapes : 

  • Nous effectuons une première analyse pour évaluer la présence d’objet géologique (une falaise, une grotte…),
  • Nous détaillons ensuite cet objet géologique, c’est-à-dire ses caractéristiques, origines et ce qu’il raconte,
  • Nous évaluons enfin son caractère patrimonial, en l’analysant au regard de critère de rareté, d’intérêt pédagogique, d’originalité ou de représentativité particulière.

Ces objets géologiques remarquables sont ensuite inclus dans la stratégie de gestion du site, avec ses facteurs d’influence, ses objectifs de gestion et les actions permettant de les atteindre. Par exemple sur le site de Gandaillat, en 2014 (début de notre implication), nous avons identifié la problématique d’érosion et d’éboulement sur les fronts de taille de l’ancienne carrière, empêchant la lecture de la stratigraphie et d’autres objet géologique. L’objectif ici était de rendre visible les objets géologiques. L’action en découlant fut le décapement des dépôts d’érosion en pied de front de taille et la réalisation de plateforme d’accès avec ces remblais.

La géologie en tant que support de biodiversité

Nous menons des études pour mieux connaître les secteurs de biodiversité liés à la géologie locale. A titre d’exemple, une étude de 2007 renouvelée en 2018 porte sur les lacs de chaux, qui sont des zones humides très particulières apparues sur les anciennes coulées volcaniques des épisodes tertiaires, devenues plateaux par inversion de relief. Ces plateaux sont appelés localement « chaux » (du latin calx, calcis : pierre). Ces « lacs » sont issus de la stagnation d’eau dans des cuvettes et peuvent être également liés à la variation du niveau d’eau de nappes présentes dans la masse basaltique. Les différentes caractéristiques physiques des « lacs de chaux » en font des milieux écologiques uniques dans la région.

Plus globalement, les formations géologiques influent sur les formations pédologiques (sols) et ont donc une influence sur la végétation… La géodiversité (diversité géologique) influe donc sur la biodiversité (diversité biologique) ! Ainsi, malgré les modifications des écosystèmes causées par le changement climatique, des contextes géologiques divers et variés sont à préserver afin d’accueillir au mieux de nouvelles espèces en déplacement et migration.

Lac de Lorlanges (D. Benard)
Sources salées Sainte Marguerite (A. Julhien)

Quelques exemples :

Pyu de Jumes Patrimoine géologique

Le Puy de Jumes

Volcan de type strombolien de la chaîne des puys. Son cratère et son flanc Sud sont occupés par des landes à callune et des pelouses sèches, alors que le versant nord est marqué par une superbe hêtraie à Scille Lys Jacynthe, le tout inscrit au réseau de protection européen Natura 2000. De plus, le Puy de Jumes offre des panoramas exceptionnels sur la Chaîne des Puys. Une action de réhabilitation des landes est sur le point d’être réalisée et un pâturage ovin pourrait permettre de conforter cette reconquête.

Puy de la Poix Patrimoine géologique

Le puy de la Poix

Un des plus petits puys d’Auvergne, regroupe au moins quatre intérêts géologiques sur quelques 100 aine de m² (volcanique, sédimentologie, ressources naturelles et hydrogéologie). Ce Puy est une cheminée de volcan, ou neck, presque complètement arasée. Il est entouré d’une gaine de pépérites** et sur le flanc est se trouvent des couches de calcaires siliceux modifiés et de calcaire compact. Au travers de la couche de pépérites émerge une source salée composée de bitume, de pétrole et d'acide sulfurique. La charge minérale de cette eau est de 80g/L (20 à 30 fois supérieure à celles des autres sources aux alentours). Ici, le bitume a été utilisé pour le marquage des brebis et le calfeutrage des embarcations de l’Allier. Ce substrat géologique diversifié engendre deux habitats exceptionnels : les eaux saumâtres ou salées sans végétation et des pelouses pionnières sur rochers.